Quels sont les pouvoirs disciplinaires de l’employeur ?
Par Me Sassi, avocat en droit du travail à Paris (www.avocat-ms.fr)
Tel 06.02.20.20.20 / sassi.avocats@gmail.com
Aux termes du Code du travail, l'employeur dispose d'un important pouvoir disciplinaire sur les salariés de l'entreprise et ce pouvoir disciplinaire s’inscrit dans le prolongement de son pouvoir général de direction et d'organisation.
En principe, les sanctions qui peuvent être prises à l'encontre d'un salarié doivent figurer dans le règlement intérieur de l'entreprise qui doit prévoir une hiérarchie qui est fonction du degré de gravité de la faute reprochée au salarié.
D’une façon générale, les sanctions sont :
- L'avertissement
- Le blâme
- La mise à pied
- La mutation
- La rétrogradation
- Et enfin, le licenciement
Qu'entend-on par faute du salarié ?
Il n’existe pas de définition de la faute dans le Code du travail et c’est la jurisprudence des Conseils de prud’hommes et de la chambre sociale de la Cour de cassation qui a permis de déterminer les contours juridiques de la faute.
Le comportement fautif du salarié est ainsi celui qui ne correspond pas à l'exécution normale du contrat de travail.
À titre d’exemple, la jurisprudence a considéré comme étant des fautes :
- Le fait d’arriver fréquemment en retard
- Le fait de quitter son poste de travail de façon intempestive sans raison valable
- Le fait de refuser de pointer alors qu'il s'agit d'une obligation prévue au règlement intérieur
- Le fait d'utiliser pour son usage personnel des objets appartenant à l'entreprise sans autorisation
- Le fait de s'endormir pendant les heures de travail
Bien entendu, ces exemples n’ont pas de valeur absolue et dans chaque affaire, le salarié peut avoir des raisons légitimes de nature à justifier son comportement et ainsi exonérer sa responsabilité.
Ainsi :
- Les retards du salarié peuvent être dus à des défaillances imprévisibles des transports collectifs
- Le fait que le salarié quitte de façon intempestive son poste peut être légitimé par l’exercice de son droit de retrait en cas de danger
- Le fait d’utiliser à des fins personnelles certains objets de l’entreprise peut ne pas être fautif si d’autres salariés en font de même
- Le fait de s’endormir pendant les heures de travail peut trouver sa cause dans les horaires abusifs exigés par l’employeur
Pour chaque faute reprochée au salarié, celui-ci doit rechercher les éléments de nature à discréditer la sanction prise par l’employeur et le rôle de notre cabinet d’avocat en droit du travail est de fonder juridiquement les faits qui peuvent servir d’excuse aux salariés.
Les règles qui conditionnent la validité de la sanction
Selon l'article L. 1131-1 du Code du travail :
« constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à l'encontre fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération »,
L’employeur ne peut ainsi infliger au salarié d'autres sanctions que celles prévues au règlement intérieur, lorsqu'il existe.
Il doit donc respecter les procédures et limites fixées dans ledit règlement.
Par ailleurs, il ne peut prendre deux sanctions pour un même fait.
En d'autres termes, des faits déjà sanctionnés, même légèrement, ne peuvent donner lieu à une seconde sanction. Cela signifie qu’un comportement qui aurait donné lieu à un avertissement ou blâme ne peut plus servir de fondement à un licenciement, l’employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire par la première sanction.
Enfin, la sanction doit être justifiée et proportionnée à la faute.
À défaut, elle pourra être annulée par le conseil de prud'hommes.
Quelle que soit la sanction envisagée, elle doit être prise dans un délai de deux mois à partir du moment où l'employeur, ou le supérieur hiérarchique du salarié fautif a connaissance des faits (article L. 1332-4 du Code du travail).
La question est de savoir quand cette prescription est acquise au salarié…
Il faut donc opérer une distinction entre les sanctions légères et les sanctions lourdes.
S’il s’agit d’une sanction légère, le délai de prescription de 2 mois court à compter de la connaissance du fait fautif par l’employeur jusqu’à la sanction elle-même (lettre d’avertissement ou de blâme).
S’il s’agit d’une sanction lourde, le délai de prescription de 2 mois court là aussi à compter de la connaissance du fait fautif mais jusqu’à la date de l’entretien préalable lui-même et non jusqu’à la date de la convocation.
Au-delà, il y a prescription et l’employeur n’est ainsi plus en droit de sanctionner le comportement du salarié.
À quoi sert la distinction entre la sanction légère et la sanction lourde ?
La jurisprudence classe les sanctions en deux grandes catégories :
- Les sanctions légères
- Et les sanctions lourdes
La procédure sera différente selon la nature de la sanction puisque, par dérogation au droit commun, une sanction légère peut être prise sans que le salarié ne soit convoqué à un entretien préalable, ce qui n'est pas possible pour une sanction lourde.
Par sanction légère, on entend une sanction qui n'affecte pas la présence, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.
En clair, il s'agit d'un avertissement, d'un blâme sans inscription au dossier, d'une lettre d'observation ou d'un rappel à l'ordre.
Une telle sanction peut donc être prise directement par l'employeur sans qu'il y ait d'explication préalable « officielle » au cours d'un entretien avec le salarié.
Dans ce cas, la sanction fait l'objet d'un écrit remis en main propre contre décharge ou adressé en recommandé avec accusé de réception. Le courrier doit énoncer les griefs retenus.
La procédure à respecter en cas de sanction lourde
L'employeur désireux d'infliger au salarié une mise à pied, une rétrogradation ou, plus généralement, une sanction qui aura une incidence, immédiate ou non, sur sa présence, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération, doit le convoquer à un entretien préalable.
La convocation se fait par courrier remis en main propre contre décharge ou par lettre recommandée avec accusé de réception qui doit indiquer l'heure, la date, le lieu de l'entretien, l'objet de la convocation et rappeler au salarié qu'il peut se faire représenter par une personne de son choix appartenant à l'entreprise ou par un conseiller du salarié dans certaines conditions.
En revanche, la convocation à l'entretien n'a pas à préciser la sanction qui sera prise, sauf s'il s'agit d'un licenciement. Notons qu'un délai « suffisant » doit être laissé entre l'envoi du courrier et la date de l'entretien.
L'entretien préalable à la prise d’une sanction
L’article L.1233-11 du Code du travail dispose que :
« L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement pour motif économique, qu'il s'agisse d'un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, convoque, avant toute décision, le ou les intéressés à un entretien préalable.
La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation.
L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation »
Durant l'entretien, l'employeur doit indiquer le motif de la sanction envisagée et il doit recueillir les explications du salarié.
Ce dernier peut se faire assister d'une personne de son choix appartenant, en principe, obligatoirement à l'entreprise.
Toutefois, l’article L.1233-13 du Code du travail dispose que :
« Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.
Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative.
La lettre de convocation à l’entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller et précise l'adresse des services où la liste des conseillers est tenue à la disposition des salariés »
Le salarié a donc la possibilité, en l’absence d’institutions représentatives du personnel, de se faire assister par un conseiller du salarié dont la liste figure généralement en mairie.
En tout état de cause, la sanction que l’employeur peut prendre ne peut être décidée qu'après l'entretien préalable au licenciement.
Elle est notifiée par écrit, toujours par lettre remise en main propre contre décharge ou par lettre recommandée avec accusé de réception. L'employeur doit rappeler la date de l'entretien et y exposer les faits reprochés. Il doit également indiquer que la mesure est prise à titre de sanction. Enfin, il doit motiver la sanction.
La Cour de cassation a jugé que, si les raisons de la sanction ne sont pas expliquées, celle-ci peut être annulée.
Cette lettre ne peut être envoyée moins deux jours francs, ni plus d'un mois après le jour de l'entretien.
En effet, et si l'employeur laisse passer ce délai d'un mois sans réagir, les faits reprochés au salarié lors de l'entretien préalable ne peuvent plus être sanctionnés dans la mesure où ils deviennent prescrits.
Quels sont les recours du salarié contre une sanction de l’employeur ?
Le salarié peut contester une sanction disciplinaire devant le conseil de prud'hommes.
En effet, seul le Conseil de prud’hommes a le pouvoir d'annuler une sanction à l'exception toutefois d'un licenciement dans trois cas :
- Lorsqu'elle est irrégulière sur la forme (par exemple, quand la procédure ou les délais n'ont pas été respectés) ;
- Lorsqu'elle est injustifiée (tel est le cas lorsque les faits reprochés au salarié ne sont pas établis) ;
- Si elle est disproportionnée par rapport à la faute commise.
Quelles sont les limites du pouvoir disciplinaire de l’employeur
La loi et la jurisprudence encadrent de façon stricte le pouvoir disciplinaire de l'employeur pour éviter les dérapages.
Tout d'abord, le fait imputable doit se produire dans le cadre professionnel.
Lorsqu'il relève de la vie personnelle du salarié, il ne peut par principe constituer une faute, ni donner lieu à une sanction.
Toutefois, lorsque le comportement du salarié, bien que s'étant manifesté dans le cadre de sa vie personnelle, a créé un trouble caractérisé dans l'entreprise et que les faits reprochés sont peu ou prou liés à la vie de l’entreprise, un licenciement pour faute grave peut être envisagé.
Cela vise notamment le cas d’un salarié qui dénigrerait ouvertement son employeur sur un réseau social.
Deuxième limite, l'employeur ne peut obliger le salarié à modifier son contrat de travail. S'il veut lui infliger une telle modification à titre disciplinaire, par exemple une rétrogradation ou une mutation géographique, le salarié est en droit de refuser.
Pour la Cour de cassation, aucune modification du contrat ne peut être imposée au salarié, même à titre disciplinaire. Enfin, un employeur ne peut évidemment pas prendre de mesures discriminatoires à l'encontre d'un salarié en raison de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de ses opinions politiques ou religieuses ...
Cela ne signifie pas pour autant qu'un employeur ne peut pas sanctionner différemment deux salariés coupables d'une même faute, par exemple pour tenir compte d'une différence d'ancienneté ou parce que leur participation à la faute n'a pas été de même ampleur.
Notre cabinet d'avocats en droit du travail à Paris a plus de 20 ans d'expérience dans la défense des salariés devant le conseil de prud'hommes de Paris et d’Ile de France (Bobigny, Créteil, Nanterre, Boulogne Billancourt, Villeneuve Saint Georges, Meaux, Melun etc.). Nous défendons ainsi tous les jours des salariés de toutes les catégories sociales (ouvriers, employés, agents de maîtrise, cadres) afin de faire valoir leurs droits à la suite d’un licenciement abusif ou sans cause réelle et sérieuse.
N'hésitez donc pas à nous contacter par téléphone au 06.02.20.20.80 ou par mail sassi.avocats@gmail.com pour fixer un premier rendez-vous gratuit qui nous permettra de faire une analyse précise de votre dossier et de vous indiquer vos chances de succès devant les Prudhommes si vous décidiez d'introduire une action devant le conseil de prud'hommes contre votre ancien employeur.